Chasse à la glu: la décision du Conseil d’État ne décourage pas la Ligue de Protection des Oiseaux
Le jeudi 3 janvier 2019, la Ligue de Protection des Oiseaux (LPO) a annoncé avoir porté plainte contre le gouvernement français devant les instances européennes pour interdire la chasse à la glu, une pratique jugée cruelle par les défenseurs des animaux, qui vise à capturer des oiseaux à l'aide de colle ultra-forte. La demande avait déjà été rejetée par le Conseil d'État, provoquant la colère de nombreux défenseurs de la cause animale. Retour sur un débat de société.

La Ligue de protection des Oiseaux (LPO) n'a pas obtenu gain de cause auprès du Conseil d'État. L'institution a rejeté la demande de l'association qui souhaitait une abrogation de l'arrêté du 17 août 1989 qui autorise l'emploi des gluaux, sur dérogation, dans les départements des Alpes-de-Haute-Provence, des Alpes-Maritimes, des Bouches-du-Rhône, du Var et du Vaucluse, quand «il n'existe pas d'autre méthode satisfaisante».
Une tradition ancienne qui se heurte à l'éthique moderne:
Le principe de la chasse à la glu est simple : les oiseaux se posent sur des pièges englués, le chasseur vient les décoller (généralement à l’aide d’un dissolvant) puis l'animal est mis en cage dans le but de servir d’appelant pour attirer d’autres grives et permettre ainsi aux chasseurs de les tirer.
Plus que de la chasse à proprement parlé, il s’agit d’une tradition, notamment pour les cinq départements. L’Association Nationale de Défense des Chasses Traditionnelles à la Grive relate d'ailleurs sur son site internet l’historique de cette méthode, qui remonterait au temps de l’empire grec. La colle était d'abord faite de boules de gui, puis de morceaux de houx.
Cette méthode traditionnelle a été plusieurs fois interdite, jugée trop cruelle, avant d’être officiellement autorisée en 1989. C’est précisément cet arrêté que la LPO souhaitait abroger en déposant un recours auprès du Conseil d’État.
La LPO informe sur cette chasse à la glu qu'elle juge cruelle:
Le directeur général de la LPO (Ligue de Protection des Oiseaux) Yves Verilhac, explique que "plus les oiseaux se débattent, plus ils s'encollent le plumage". Une méthode jugée cruelle, qui mettrait aussi en danger d'autres espèces que la grive, comme la mésange ou le rouge-gorge.
88.6 % des Français contre la chasse traditionnelle:
Le ministère de la Transition écologique avait proposé en 2018 une consultation publique en ligne sur les méthodes de chasse traditionnelles. Sur 5667 réponses, seulement 579 (10 %) étaient pour le maintien de ces méthodes. 5021 y étaient défavorables. Le 24 août 2018, le ministère avait donc conclu: « compte tenu de la proportion d’avis défavorables calculée à 88,6 %, il est proposé que le contenu des projets de textes fasse l’objet de modifications. » Sauf que depuis, aucune modification sur les méthodes de chasse traditionnelle n’a été faite, si ce n’est que François de Rugy, le ministre de la Transition écologique et solidaire, a abaissé le 27 septembre 2018 les quotas d'oiseaux pouvant être chassés dans l’année...
La LPO ne se laissera pas faire par la décision du Conseil d'État:
Refusant d'examiner les nouveaux éléments fournis par la LPO, à savoir l'arrêté de la Cour de justice de l'Union européenne du 9 décembre 2004 condamnant l'Espagne pour la pratique des "parny" (gluaux) sur la commune de Valence, des rapports d'experts vétérinaires à l'appui confirmant les dommages irréversibles sur les espèces ainsi capturées, le Conseil d'État s'est définitivement mis à dos la LPO.
La ligue reproche au Conseil d'État de ne pas prendre en compte les blessures des oiseaux, même libérés, encore leur contamination par des solvants utilisés pour les décoller, et la menace qui pèse sur des espèces protégées qui peuvent s'engluer à leur tour.
Afin de contester cette décision, La LPO a décidé de porter l'affaire devant la Commission Européenne.
Les adeptes de la chasse à la glu saluent la décision
L’Association Nationale de Défense des Chasses Traditionnelles a la Grive considère que la décision « met fin à une période extrêmement pénible pour tous les passionnés de ce mode de chasse, nombreux dans notre région » et poursuit en dénonçant: «un matraquage permanent, dans tous les médias, de la part des anti-chasses qui souhaitent faire interdire cette pratique ancestrale sur la base d’une argumentation essentiellement idéologique. »
Un débat pour le moment clos, mais qui risque de vite refaire surface, puisque cette décision intervient en totale contradiction avec la jurisprudence européenne. En effet, selon l'Association française des parcs zoologiques, la Cour de justice de l'Union européenne a condamné l'Espagne et Malte pour avoir autorisé ce type de chasse sur son territoire. Rappelons que 42.500 grives et merles ont été capturés par la chasse à la glu l’année dernière.