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Duel d'ego en orbite

Dernière mise à jour : 1 févr. 2022

La deuxième moitié du XXème siècle a été rythmée par la Guerre Froide entre les Etats-Unis et l’URSS. Les livres d’Histoire retiennent une guerre idéologique entre deux puissances qui partageaient une vision différente de la société. Mais ce conflit a pu prendre par moment des airs de batailles d’égo. La conquête spatiale nous offre l'une des plus belles anecdotes à ce sujet.


Nous sommes en 1972. Les Américains ont marché sur la lune à 6 reprises depuis 1969 avec le programme Apollo et ont définitivement confirmé leur supériorité dans l’espace. Depuis le début de la décennie, les relations s’apaisent entre les deux blocs. Comme symbole de la détente entre les deux puissances, une collaboration dans le domaine spatial est alors envisagée. Voir des soviétiques et des américains trinquant ensemble en orbite autour de la Terre serait une image forte témoignant de l’apaisement entre les deux puissances et marquerait le début d’une potentielle collaboration économique. Il est convenu d’un rendez-vous orbital entre un module soviétique et un module Américain pour l’année 1975. C’est la naissance de la mission Apollo-Soyouz.





Des ingénieurs de la Nasa travaillant sur le système d'amarrage de la mission Appolo-Soyouz

Un rendez-vous orbital consiste en l’amarrage de deux vaisseaux en orbite autour de la Terre. Les deux vaisseaux se rapprochent progressivement au cours de longues minutes, lancés à plusieurs dizaines de milliers de km/h dans le vide spatial et se fixent l’un à l’autre grâce à un module d’amarrage. L’un des enjeux de la mission Apollo-Soyouz fut de mettre au point un module d’amarrage compatible afin d’en équiper les vaisseaux Soyouz et Apollo et d’assurer le succès de la mission.

Un module d’amarrage classique, comme le système d’amarrage cône-sonde qui équipait la majorité des modules de l’époque est composé de deux parties : une partie active, ici la sonde, aussi appelée le port « mâle » et une partie passive, le cône, appelée le port « femelle ». La logique est la même que pour les branchages électroniques. Il suffit donc pour les ingénieurs de la mission de développer un système d’amarrage classique et d’équiper chaque module de la partie mâle ou femelle, comme on a toujours fait depuis 1965 et le premier amarrage orbital de la mission Gemini 8 du programme américain.

Peinture symbolique de la mission Apollo-Soyouz

Mais tout se complique lorsque des considérations diplomatiques et politiques viennent brouiller le travail des ingénieurs. Aucun des deux pays ne supportait l’idée d’équiper son vaisseau d’un module d’amarrage femelle et de se laisser amarrer par le module mâle du pays rival. Les ingénieurs durent mettre au point un système d’amarrage androgyne, totalement nouveau et plus complexe, l’APAS. Chaque vaisseau fut équipé de ce module hybride qui pouvait à la fois jouer le rôle passif et actif dans les manœuvres d’amarrage. L’argent et le temps de travail investi dans le développement de ce module d’amarrage inédit était le prix à payer pour ne pas froisser les égo d’hommes politiques qui voyaient sans doute dans le port d’amarrage femelle une atteinte à la fierté de la Patrie.

Le système androgyne APAS d'Appolo-Soyouz

Après trois ans de développement, le décollage de la fusée Soyouz depuis la base de lancement de Baïkonour et de la Saturn 1B depuis le Cap Kennedy marque le début de la mission. Le 17 juillet 1975, après avoir solidement amarré les deux vaisseaux grâce au système APAS, la poignée de main symbolique entre astronautes et cosmonautes eu lieu sans encombre, bien loin des considérations politiques restées au sol.

Il faudra cependant attendre 1994, et la chute de l’URSS pour voir une nouvelle collaboration spatiale entre les deux puissances avec le programme Shuttle-Mir.


L'équipe d'Apollo-Soyouz



Article rédigé par Léo-Paul Charlet

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